Les messages publicitaires constituent le premier niveau des interventions
éducatives. Ils visent à mieux faire connaître les principaux facteurs de risques
inhérents aux postes de travail, à contrôler le stress physique ou psychologique
particulier d'une tâche et à éduquer le grand public à l'aide de quelques
messages simples. En théorie, cette option préventive se défend bien. En
pratique, le rapport entre l'investissement à faire et les gains obtenus
n'apparaît pas explicitement. Les facteurs de risques sont aussi divers
qu'illimités. Si les vibrations ou certains travaux lourds peuvent être modifiés
en conséquence, la satisfaction associée au travail se module plus
difficilement. Et ce facteur présente pourtant une bien meilleure valeur
prédictive que des tests de personnalité (339). Puisque
cancers du poumon et cardiopathies graves convainquent difficilement les
fumeurs de s'éloigner de la cigarette , il n'est pas surprenant que la menace
possible d'une éventuelle lombalgie soit sans effet. Promesses de conserver
la qualité actuelle de son dos et risques hypothétiques soulèvent rarement la
motivation et l'intérêt requis pour réaliser des apprentissages efficaces (mais
exigeants) à long terme. Plus efficaces donc des messages publicitaires bien
ciblés visant à retenir l'attention de quelques « clients » parmi une
foule de « touristes » souvent trop préoccupés par les contraintes de
leur vie quotidienne pour y apporter l'attention requise. Les tableaux 4.1 et 4.2
présentent quelques messages possibles liés aux facteurs de risques, soit
individuels, soit rencontrés au travail (120).
Tableau 4.1 Facteurs individuels de risque †
Croyances populaires |
Messages simples |
Âge: les risques de lombalgie augmentent avec l’âge. |
Faux. Les risques maximum se situent entre 35 et 55 ans. |
Anthropométrie: la grandeur ou l’obésité accroissent les
risques. |
Faux. Les données anthropométriques ne démontrent aucune
corrélation sérieuse entre taille, poids, stature et lombalgie. |
Mobilité lombaire : la plupart des lombalgiques se plaignent
d’une réduction des mouvements lombaires en flexion ou extension. |
Faux. Aucune évidence qu’une réduction de la mobilité
vertébrale soit un facteur de risque. |
Force: la force du tronc et des abdominaux est plus réduite
chez les lombalgiques. |
Cause ou conséquence? Pas de valeur prédictive pour ces tests
à moins d’être directement liés à la tâche à accomplir (renforcement
musculaire associé au poste de travail). |
Histoire médicale: une histoire de sciatalgie ou de maux
de dos prédispose le lombalgique à des rechutes. |
Vrai. 70% de ceux qui bénéficient de compensation ont déjà
eu un incident préalable. Une clientèle à risque. |
Expérience: l’inexpérience augmenterait les risques. |
Pas de données pour étayer l’aspect prédictif de cette
croyance. |
Cigarette: corrélation avec la lombalgie. |
Pas de lien démontré scientifiquement entre cigarette et
lombalgie chronique. |
Étiquettes psychologiques: hystérie, hypocondrie, anxiété,
dépression, insatisfaction au travail prédisposent aux lombalgies. |
Cause ou conséquence? Le débat reste ouvert et l’usage d’une
classification basée sur la maladie « mentale » relève d’une
conception monadique de l’individu. |
Anormalités structurelles: elles prédisposent aux lombalgies
comme dans le cas de la scoliose (<35°), cyphose, hypo ou hyper lordose, différence de longueur des jambes, augmentation de l’angle lombo-sacré, spina bifida occulta, sacralisation partielle ou complète, osthéoarthrite, ostéoporose, spondylolyse ou spondylolisthésis. |
Pas de valeur prédictives comme facteurs simples à
l’exception du spondylolisthésis, où les données sont contradictoires, et du
rétrécissement sur plusieurs étages de l’espace entre les disques.
(Voir
tableau 3.7) |
†Adapté de GARD A., MOORE S.J. (1992). Epidemiology of low back pain in industry. Occupational Medicine, 7, 593-608.
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Tableau 4.2 Facteurs de risques au travail †
Croyances populaires |
Messages simples |
Un travail physique exigeant renforce le dos et réduit les risques de lombalgie. |
Faux. Malgré quelques données contradictoires. La sévérité des blessures est souvent plus importante chez les travailleurs manuels. |
Soulevé, pousser, flexion et torsion : la combinaison de ces trois facteurs correspond à la cause la plus fréquente de lombalgie. |
Vrai. Des efforts maximaux imprévus et répétés sont dangereux. Surtout les soulevés. Entre 25 et 70 % des blessures lombaires proviennent des manutentions. |
La position de la charge par rapport au corps est aussi importante que son poids. |
Vrai pour des raisons biomécaniques bien connues. |
Le poids des charges est un facteur de risque pour le système musculo-squelettique. |
Vrai. Les risques augmentent à partir de 16 kg près du corps et de 9 kg entre 60 et 80 cm du corps. |
Les levers répétitifs chez le travailleur manuel augmentent les risques de hernies. |
Vrai. Le danger augmente significativement dans le cas de levers répétitifs de plus de 20 kg. |
Il faut éviter de fléchir le dos en soulevant un objet. |
Vrai. Une des causes les plus communes des maux de dos. |
Les rotations répétitives sont dangereuses. |
Vrai. Bien que ce facteur soit difficile à dissocier du soulever. |
Pousser et tirer, deux activités à risques. |
Vrai. Entre 9 et 18 % des blessures lombaires en découlent. L’idéal : ne pas dépasser un mètre et travailler au niveau des hanches. |
Les postures prolongées, debout ou assis, n’augmentent pas les risques. |
Toute posture maintenue trop longtemps est nocive. |
Les vibrations relaxent les muscles du dos. |
Faux. À long terme, elles provoquent la fatigue des muscles paraspinaux et des ligaments, ainsi que des blessures aux disques. |
Les accidents comme glisser, trébucher, déraper ou manquer son appui restent une cause fréquente de lombalgie. |
Vrai. Un accident de ce type augmente la durée de l’absence et le coût de l’arrêt de travail. |
† Adapté de GARD A., MOORE S.J. (1992). Epidemiology of low back pain in industry. Occupational Medicine, 7, 593-608.
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