Le praticien applique la tactique expert non-expert en utilisant, à
mesure qu'évolue le traitement, une position adaptée, et aux
particularités du lombalgique, et à la spécificité de la situation. Pour
établir le lien entre cette tactique thérapeutique et un des axiomes
de la communication, rappelons-nous que la communication complémentaire
implique par définition deux positions : one up et one down.
Le praticien applique la tactique expert non-expert en choisissant de
façon stratégique soit la position d'expert (one up), soit la
position de non-expert (one down) dans ses relations
complémentaires avec le lombalgique. En cas de doute, il doit
privilégier la position de non-expert pour deux raisons. D'une part,
l'expérience clinique nous enseigne qu'il est assez rare de trouver un
lombalgique qui réagisse bien et longtemps à une position d'autorité
(one up). D'autre part, il est plus facile de passer de la
position one down à une position one up que le contraire.
En outre, une position one down est fréquemment requise du fait
que le lombalgique chronique demeure l'unique « expert » de sa douleur
lombaire (chapitre 2). Deux exemples illustrent le pouvoir d'influence
découlant du fait de prendre une position one down. Poser une
question et y répondre constitue une interaction complémentaire où
questionner occupe la position inférieure et répondre la position
supérieure (340). Au début de la première rencontre en groupe, le
praticien interactionnel prend stratégiquement une position one down
en présentant les douze étapes du programme. Il pose systématiquement
des questions à chacun des participants en classe. Pensez-vous avec
cette étape soulager vos douleurs lombaires ? Avez-vous déjà essayé
d'autres traitements ? Depuis combien de temps souffrez-vous de
maux de dos ? Par ses réponses, le client lombalgique révèle ses
attentes. Une information substantielle, et pour l'animateur, et pour
les autres participants. Elle procure au praticien la première
opportunité en classe de moduler profondément les attentes de chacun
de ses lombalgiques (chapitre 6).
Une opportunité qui ne se présente tout simplement jamais si le clinicien
occupe systématiquement une position one up.
Autre exemple : à la seconde rencontre en groupe, les participants sont
initiés à un jeu de six cartes. Un support didactique destiné à proposer
un rationnel à l'origine de leur douleur. Carte musculaire et
ligamentaire, facettaire, discale, d
éséquilibre lombaire (combinaison de la carte facettaire et discale),
racine nerveuse et carte médicale composent la donne initiale
(tableau 6.1).
Au lieu d'offrir d'emblée son diagnostic professionnel (plus que
contestable de toute façon chez le lombalgique chronique (281),
le praticien prend une position one down en laissant chaque
participant le soin de déterminer par lui-même les cartes de la douleur
qui « décrivent » le mieux son problème lombaire. Le praticien
porte alors son attention au « langage » du lombalgique, à la
version de la réalité qu'il propose, tout en lui procurant les
informations requises pour le faire cheminer dans sa réflexion -
favorisant ainsi une véritable démarche d'auto-apprentissage
(57). Au fond, toutes les positions d'intervention
du praticien, expert, non-expert et égalitaire, doivent être adaptées
aux particularités du lombalgique et à son cheminement dans le programme.
Travaille-t-on avec un client qui collabore davantage si le praticien
se place en position consistant à l'encourager et à lui donner confiance ?
C'est ce type de position qu'il convient alors d'adopter. Mais, parmi
toutes les positions d'influence possibles, la position one down
laisse au praticien les meilleures marges de manoeuvre.
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