Objectif 1 : douze étapes; pause interactionnelle
L'animateur énumère les trois objectifs de la leçon. Premièrement :
connaître les douze étapes du programme. Deuxièmement : clarifier à l'aide
d'un contrat ce que nous attendons les uns des autres. Troisièmement :
apprendre à évaluer ses douleurs. Ensuite, le praticien module leur espoir de
guérison. Les conditions d'admission à l'École interactionnelle comportent aussi
des critères d'exclusion. Leur sélection prouve deux points. Le praticien est en
mesure de les aider. Et il juge leur motivation suffisante pour entreprendre
une démarche aussi exigeante. Cette intervention encourage et motive un peu plus
encore les participants. Le clinicien oriente finalement leurs attentes en
avertissant qu'il ne les guérira pas personnellement. Il va plutôt leur
proposer des outils pour s'autoguérir. La présentation du premier objectif vise
à s'assurer chez le client de la conformité des attentes avec les objectifs du
programme (diapo # 1-04 à 1-17).
Ne faites pas de conférence sur le contenu
pédagogique des étapes. Plutôt, façonnez leurs expectatives en favorisant un
échange de vues. Débutez tout bonnement en nommant l'étape. Demandez, à chaque
lombalgique, ce qu'il connaît et ce qu'il pense de l'importance de cet élément.
Pense-t-il avec cette étape soulager ses douleurs lombaires ? Par ses réponses,
le client révèle ses attentes. Une information cruciale. Elle procure au
praticien la première opportunité en classe d'influencer profondément les
expectatives d'efficacité de chaque lombalgique. Une intervention requise pour
s'assurer toute la marge de manoeuvre nécessaire en vue de remplir le contrat.
Une intervention d'autant plus importante que le but de l'École interactionnelle
vise à se prendre en charge pour s'autotraiter. La présentation de l'ensemble
des étapes de l'École s'achève avec l'arrivée de la pause. Une heure exactement
après le début de la leçon . L'animateur participe à cette pause en appliquant
la tactique thérapeutique position symétrique dans ses échanges avec les
participants
(diapo # 1-18).
Objectif 2 : contrat
La négociation du contrat débute immédiatement après la pause. Le praticien
rappelle que le contrat sert à clarifier les attentes réciproques. L'entente à
établir concerne essentiellement deux éléments : réduction de la douleur et
deux objectifs personnels
(figure 5.1). Pour
préciser le pourcentage de réduction à inscrire sur le contrat, l'animateur
introduit l'importante discussion suivante par cette remarque
(diapos # 1-19 à # 1-20)
« si le traitement dans lequel vous vous engagez diminuait votre mal de
dos de un pour cent (1 %), cela ne constituerait évidemment pas une
diminution suffisante. Pour vous, quelle serait , la plus petite diminution de
la douleur que vous considéreriez comme une amélioration importante, pour
justifier vos efforts à la suite de ce traitement ? » Le praticien
pose cette question à chacun des participants et note sa réponse. Dans cette
discussion, il ne faut pas oublier l'état de chronicité des lombalgiques et,
surtout, le fait qu'il s'agit d'un changement minimal. Le pourcentage de
réduction de la douleur doit se situer entre 5 et 25 %. Au client qui
choisit le maximum (soit 25 %), le praticien tente de négocier la
réduction de ce pourcentage de deux façons. Premièrement, en rappelant au
lombalgique que plus le pourcentage est élevé, plus il devra consacrer de temps
chaque semaine aux activités prévues au programme. Ce qui signifie également
plus d'efforts et plus de douleur. Deuxièmement, en lui demandant :
«&nbp;En supposant que vous obteniez une réduction de 20 % au lieu
de 25 %, ce résultat de 20 % signifierait-il pour vous que cela ne
valait pas la peine de participer à l'École du dos ? ».
Un seul but : obtenir le plus petit pourcentage possible de réduction pour
s'assurer ainsi que le lombalgique puisse l'atteindre et même le dépasser. En
consacrant tout le temps nécessaire à cette négociation, l'animateur opère un
ajustement substantiel des attentes des clients. Il lie étroitement les efforts
personnels à consentir et le résultat escompté. La question sur « la plus
petite » diminution n'est pas facile à saisir pour le lombalgique qui
souhaite (toujours) une réduction totale de sa douleur lombaire. Durant cette
négociation, le praticien prend donc soin de répéter que nous visons tous une
réduction supérieure à celle qui sera inscrite au contrat. Pour le moment, sa
tâche consiste simplement à déterminer la plus petite réduction acceptable.
Le changement minimal - la plus petite réduction de la douleur, satisfaisante
pour le lombalgique et justifiant sa participation à l'École - reste la pierre
angulaire du contrat. Finalement, l'animateur explique que la réduction de la
douleur sera évaluée par comparaison entre la fin et le début de l'École. Aux
uns et aux autres, cette évaluation procurera une mesure concrète de l'effet
du traitement.
Le second élément du contrat concerne les objectifs personnels du client. Lors
de l'évaluation clinique, ce sujet a déjà été abordé avec lui. Procurez des
exemples d'objectifs poursuivis par d'autres participants en fournissant une
copie du tableau 5.2 à chacun de vos participants. D'ici la prochaine rencontre,
invitez-les à inscrire au verso du contrat au moins cinq objectifs personnels
qui les stimuleraient à poursuivre. Au cours de la seconde rencontre, après
discussion avec l'animateur, deux seront inscrits au contrat.
Objectif 3 : évaluation de la douleur
L'évaluation de la douleur est indispensable. Le seul moyen de connaître si
l'efficacité de votre traitement atteint le résultat « écrit » sur les
contrats individuels de vos clients. Ce résultat s'obtient en comparant, pour
chaque lombalgique, sa douleur avant et après le traitement.
Expliquez-le à vos clients. Puis, distribuez-leur quatre exemplaires des
échelles visuelles analogiques présentées à la figure 5.2.
Des échelles fiables et très sensibles aux modulations douloureuses
(75, 98,
153, 186,
239,240). Un outil qui permet, en plus, de valider et de
rester critique face à ses interventions. Par comparaison avec la traditionnelle
question : « Mon traitement vous a-t-il fait du bien ? »,
les échelles de la douleur constituent un instrument scientifique plus proche de
la réalité du lombalgique chronique. Par essence, la douleur chronique fluctue.
L'évaluation de la douleur lombaire, chaque deux heures durant trois jours
(consécutifs ou non), s'avère être une mesure bien plus fiable et valide de ces
fluctuations (241). Les deux composantes, intensité et
aspect désagréable, sont importantes. La comparaison décrite à
l'encadré 5.1 aide à les distinguer.
Tableau 5.2 Exemples d’objectifs personnels
Activité (au plan) |
Comportement mesurable (Parvenir à:) |
Affectif |
- ne pas avoir peur de jouer avec mes enfants 2 soirs par semaine;
- passer deux à trois heures consécutives sans douleur;
- ne pas avoir peur de faire l’amour une fois par semaine;
- ne pas avoir mal au dos au moins 3 jours par semaine;
- ne pas avoir de douleur au dos après la journée de travail, 3 fois par semaine;
- planifier un voyage sans peur de crise aiguë sur les lieux de vacances;
|
Cognitif |
- connaître les postures qui vont m’empêcher d’avoir de la douleur;
- visualiser au plan anatomique la cause de mon problème lombaire;
|
Cardiorespiratoire |
- faire une heure de natation trois fois par semaine;
- faire du ski de fond 30 minutes consécutives;
- jouer au tennis 1 heure sans trop en subir les conséquences le lendemain;
- faire du jogging 15 minutes par jour;
|
Postures assises |
- conduire mon auto jusqu’à Montréal (700 km);
- me déplacer en auto sans utiliser mon siège électrique pendant 1 heure;
- me rendre en automobile à Val d’Or (100 km);
- assister à un cours de 3 heures avec peu ou pas de douleur;
- rester assise pendant une heure avec peu ou pas de douleur;
- passer 1 heure assise sans devoir me coucher à cause de la douleur au dos;
|
Postures debout |
- répartir mon poids sur ma jambe gauche douloureuse 30 min par jour;
- rester debout de 20 à 25 minutes sans m’asseoir;
- marcher pendant une heure consécutive;
- monter les escaliers à l’université sans douleur;
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Postures couchées |
- me réveiller seulement 4 à 5 fois par nuit à cause de la douleur;
- me lever 4 matins sur 7 avec peu de douleur au dos;
|
Force |
- soulever deux chaudières pleine d’eau;
- transporter un poids de 25 kilos sans avoir de crise aiguë;
- reprendre mes activités de poids et haltères 30 min par jour;
|
Coordination |
- bien jouer aux quilles comme auparavant (i.e., atteindre ma moyenne);
|
Travaux ménagers |
- passer l’aspirateur sans " bloquer du dos " le reste de la journée;
- faire un gâteau en ayant peu ou pas mal au dos;
- coudre pendant 3 heures;
- pelleter la neige devant mon entrée de maison;
- faire mes tâches ménagères pendant une heure continue;
- faire la vaisselle en ayant peu ou pas mal au dos;
|
Réchauffement |
- réduire ma période matinale de réchauffement actuelle (3 hrs) à une heure.
|
|
Pour s'assurer que l'usage des échelles au cours de la semaine à venir ne posera
aucun problème, l'animateur organise une première évaluation en classe. Les
participants se servent d'un des quatre exemplaires des échelles de la douleur
qu'ils ont en main. Ils utiliseront les trois autres à domicile. Tout en
continuant sa leçon, l'animateur leur demande, chaque deux minutes pendant
10 minutes, d'évaluer l'intensité et l'aspect désagréable de leur douleur
actuelle. Un simple trait de crayon sur les deux échelles. (Pour les besoins de
l'exercice, chaque évaluation équivaut à une des heures inscrites en ordonné sur
le graphique.) Il vérifie ainsi leur compréhension des échelles et, s'il y a
lieu, fournit des explications supplémentaires. L'animateur s'assure ainsi que
les clients saisissent parfaitement les deux consignes suivantes : distinguer
les deux composantes de la douleur ; toujours évaluer la douleur ressentie
au moment même de l'évaluation. La mémoire de la douleur n'est pas fidèle
(92). En fait, nous avons tendance à exagérer l'intensité
ou l'aspect désagréable de nos douleurs passées
(40, 89, 99,
152, 225, 226). Pour éviter ce biais,
le client indique la douleur ressentie au moment de tracer le trait sur la ligne
appropriée.
Encadré 5.1 Deux composantes de la douleur
La douleur ressentie comporte deux composantes distinctes. D’une part,
l’intensité ou la force avec laquelle vous ressentez la douleur physique.
D’autre part, la prise en compte du côté désagréable ou
dérangeant de la douleur qui rend l’expérience déplaisante,
pénible, voire parfois insupportable. Pour illustrer la distinction entre
ces deux aspects, comparons la douleur au « son » émis par la
radio. En augmentant le volume, vous percevrez le son comme peu, moyennement ou
très bruyant. Ceci correspond à l’intensité. En
même temps, vous pouvez vous demander jusqu’à quel point le son vous
dérange. Est-ce plaisant, déplaisant ou très
déplaisant ? Ceci correspond à l’aspect
désagréable. Cet aspect désagréable ne
dépend pas seulement de l’intensité, mais aussi d’autres facteurs
comme la mélodie, l’ambiance, la période de la journée
(nuit ou jour), etc. En somme, la douleur peut être perçue comme
étant désagréable sans être intense. Elle peut aussi
être intense sans pour autant être trop désagréable. Ou
encore, tout à la fois, être intense et désagréable.
Ces deux composantes, nous vous demandons de nous aider à les mesurer. En
utilisant les deux échelles que je vous remets maintenant, indiquez, par un
trait de crayon, le point qui correspond le mieux à l’évaluation
actuelle de l’intensité et de l’aspect désagréable de
votre douleur.
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