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 8. Syndrome de déconditionnement mental

RÔLE DE LA PENSÉE

L'expérience du pendule de Berkow (décrite plus loin) sert d'amorce à cette leçon-ci. Cette expérience témoigne du rôle primordial joué par la pensée dans la gestion de la douleur. Ensuite, au cours de cette leçon et des répétitions ultérieures, le lombalgique s'initie à des techniques de relaxation et de visualisation. Pour remédier aux effets du déconditonnement mental et pallier à ses conséquences sur sa lombalgie chronique, il apprend à agir directement sur la carte musculaire et indirectement sur la douleur chronique.

Sur la carte musculaire

Pour agir directement sur la carte musculaire, les preuves associées à l'utilisation des techniques de relaxation ne sont plus à faire (55). L'apprentissage bien contrôlé de ces techniques psychomotrices aboutit toujours à une réduction significative du paramètre musculaire, un des nombreux paramètres affectés par la Réponse de Relaxation (la réaction spécifique de l'organisme à l'apprentissage de ces techniques). Toutes les techniques mentales, sans distinction, arrivent à des effets significatifs sur la fonction motrice à une condition. Elles doivent inclure, parmi les ingrédients de leur apprentissage, les simples composantes suivantes :

  • une fonction cible, motrice, mentale ou un paramètre physiologique spécifique ;
  • plaire au participant qui doit croire à l'efficacité de ce qu'il pratique ;
  • le minimum de stimulations extéroceptives ou proprioceptives ;
  • des répétitions régulières ;
  • une bonne dose de concentration passive sans préoccupation pour la performance à réaliser (23).

Partisans de Schultz, supporters de Jacobson, des mantras hindous, des techniques plus traditionnelles issues du Xi Gong Chinois ou des techniques plus récentes issues de la rétroaction biologique, inutile de vous lancer dans un débat contradictoire sur la supériorité de telle technique par rapport à telle autre (16,149,218,232,327). La croyance du lombalgique dans l'efficacité de la technique pratiquée reste, encore ici, l'élément le plus significatif de cet apprentissage. Les Asiatiques retrouvent probablement plus facilement leurs repères traditionnels dans les circulations énergétiques et les images contenues dans leurs exercices de Xi Gong et de Tai Chi. Les Hindous, dans leurs mantras et leurs techniques méditatives. Quant aux Nord Américains ou aux Européens, ils apprécieraient probablement davantage l'approche haute technologie délivrée par les pratiques issues de la rétroaction biologique. L'École interactionnelle favorise les solutions les plus simples. Un bon vieux mantra pour ce lombalgique " rétro ", une technique méditative pour cette cliente-là ou une visualisation autodirigée pour ce participant. Dans les pratiques mentales destinées à intervenir directement sur la fonction motrice, l'éclectisme le plus absolu cohabite obligatoirement avec la demande du client. La seule technique qui fonctionne, c'est celle que le lombalgique pratique !

Mais enseigner des techniques mentales s'avère souvent laborieux. Face à des paramètres difficiles à quantifier, la mesure de l'évidence (qui prouve invariablement au lombalgique l'efficacité des activités prescrites à la rencontre précédente pour améliorer sa condition physique) s'applique plus difficilement. L'expérience et la discrimination proprioceptive nécessaire au lombalgique pour valider sa propre réussite reste généralement l'apanage des plus habiles du groupe. Maîtrisent rapidement ces apprentissages ceux qui réussissent déjà à exercer un contrôle partiel de leurs tensions initiales. Convaincre les autres nécessite l'utilisation judicieuse des interactions de son groupe. Comme c'est souvent le cas à l'École interactionnelle, le meilleur moyen pour l'animateur de convaincre les sceptiques et de les rallier à ces pratiques mentales consiste à utiliser le plaidoyer des clients les plus habiles en faveur des effets recherchés. Pour " convaincre " de l'efficacité des techniques mentales, l'opinion d'un lombalgique exerce plus d'influence sur les clients que celle du praticien. En plus, quelques artifices l'aident ici. Baume du tigre ou autres produits vasodilatateurs augmentent la circulation locale associée à la perception de chaleur. Ils facilitent ainsi cet autocontrôle. La stimulation mécanique intense d'une zone gâchette favorise ultérieurement la concentration mentale sur cette localisation spécifique (2).

Toutefois, derrière les effets directs et indiscutables de ces techniques mentales sur la carte musculaire se cache un débat académique plus complexe. Il oppose chercheurs et cliniciens. Les cliniciens s'accordent pour souligner le fait qu'une tension musculaire excessive génère ou exacerbe certaines douleurs lombaires. Argument classique : la douleur se juxtapose à une augmentation du tonus musculaire. Le spasme réflexe immobilisant et protégeant initialement la partie lésée contribue, par sa contracture même, à entretenir cette douleur. Face à ces myalgies d'origine réflexe, la réponse de relaxation agirait directement sur le support tonique. D'ailleurs, le seul " atout " que nos lombalgiques ne sont pas autorisés à écarter dans leur démarche personnelle sur la recherche des " causes " de leur lombalgie concerne précisément la carte musculaire. Quelle que soit l'origine, réelle ou hypothétique de leur douleur, cette carte se prête trop bien à l'apprentissage des techniques les plus simples de prise en charge pour l'éliminer. Mais sur les chemins de la guérison, cette " évidence clinique " suppose malheureusement un postulat qui ne génère que peu d'enthousiasme parmi les chercheurs : réduction de la tension égale diminution de la douleur.

Sur la douleur chronique

Peut-on affirmer que la douleur chronique soit directement proportionnelle au tonus musculaire ? L'activité du système nerveux autonome au repos et le niveau de fonctionnement électromyographique global donnent des résultats contradictoires. Ils ne permettent finalement de conclure ni dans le sens de cette hypothèse ni à son encontre (68,106,163,182,289). Certains contestent ouvertement le modèle clinique du " spasme musculaire " chez le lombalgique chronique (49). Sur la base d'une analyse spécifique de la variable " électromyographie ", d'autres démontrent que le tonus musculaire du lombalgique chronique ne manifeste pas, au repos, un niveau d'activité supérieur à celui des sujets contrôles (292,293). Par contre, la réponse de relaxation déclenche nettement l'abaissement temporaire de certains paramètres physiologiques tels que la fréquence cardiaque ou respiratoire, la pression artérielle et l'activité électrodermique (23,55,345). De plus, un détail technique émerge systématiquement : la respiration profonde et lente apporte une contribution essentielle en rehaussant l'efficacité de toute technique de relaxation et d'imagerie mentale (276).

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