Mercure, Chenard, Charest, Lavignolle, Marchand
Les maux de dos chroniques demeurent une problématique mal définie. Dans l'état du
Tennessee aux États-Unis, par exemple, « 90 % des lombalgiques qui bénéficient de
compensations financières les obtiennent pour des diagnostics non spécifiques » (346,
p. 869). Chez la majorité d'entre eux, les médecins ne parviennent pas à identifier les
structures en cause, ni à l'intérieur, ni autour du segment mobile (119,282,283). Ici,
la démarche linéaire des tableaux cliniques (tableau 3.7) devient incapacitante pour le
clinicien: s'il n'y a pas de diagnostic spécifique, il ne peut y avoir de traitements
particuliers. Un raisonnement qui mène droit au vide thérapeutique. Pour l'éviter, les
cliniciens se sont empressés de combler les carences des tableaux cliniques par les
tableaux fonctionnels (tableau 3.8). Ceux-ci procurent une logique aux interventions:
allongement des chaînes postérieures, délestage du disque, restructuration posturale,
libération des nerfs emprisonnés, ajustement des facettes déplacées, mobilisation des
os du crâne, réduction des spasmes musculaires localisés, circulation énergétique, etc.
Une logique qui masque toutefois une faille d'envergure. Comme nous le verrons bientôt,
les interventions découlant des tableaux fonctionnels produisent des données de
recherche qui prouvent tout et rien du tout. À l'opposé, la perspective pragmatique du
comportement humain conduit le praticien à prescrire des mouvements en utilisant une
tactique simple, le 180-degrés. Cette tactique thérapeutique se retrouve à la base des
routines motrices adaptées à la condition de chaque lombalgique chronique.
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